“Notre rôle, mettre en valeur ce beau métier des crémiers fromagers et celui de nos producteurs”
Dans une interview exclusive, Julien Hazard, président de l’Association des Fromagers de Belgique, évoque les objectifs principaux de l’association, mentionne également l’importance des boutiques spécialisées et des marchés pour la diversité fromagère en Belgique. Il souligne, enfin, les tendances actuelles de consommation de fromages dans le pays.
Comment définiriez-vous le rôle de l’association des fromagers de Belgique à l’échelle nationale ?
La première chose, c’est de défendre les intérêts de nos membres auprès des instances publiques, des instances économiques et des instances sanitaires. Nous faisons aussi partie du comité économique en Belgique où tous les secteurs sont représentés.
La deuxième chose, c’est la mise en valeur de notre métier et de notre artisanat, et donc d’essayer d’expliquer au grand public pourquoi il est important d’aider les crémiers fromagers détaillants. Nous sommes là pour leur expliquer quelles différences nous apportons ainsi que notre plus-value.
Notre rôle est vraiment de mettre en valeur ce beau métier des crémiers fromagers et celui de nos producteurs. En effet, ce sont les producteurs qui produisent les produits que nous vendons.
Nous mettons également en place des interactions entre les membres pour qu’il y ait des discussions entre eux, pour qu’ils ne se sentent pas toujours seuls quand ils ont des questions, et qu’ils puissent les partager avec d’autres crémiers fromagers. Pour cela, nous organisons des activités, des visites de fromagerie, des réunions avec des instances ou encore des tables rondes.
Nous leur donnons aussi un support d’informations, que ce soit des informations économiques ou des informations sur les réglementations sanitaires et sociales. Nous mettons également en place de la formation continue.
Comment la production fromagère belge se distingue-t-elle des autres ?
On a un historique fromager abbatiale, mais on n’a pas de véritable filiale. On a un seul fromage AOP en Belgique qui est le Herve, Herve AOP, du côté Sud-Est de la Belgique dans la région de Nièvre. C’est le seul fromage où différents producteurs produisent ce même fromage et ont vraiment une filière. De plus, depuis plusieurs années, on constate une augmentation assez importante de producteurs fermiers. Ils se sont lancés de manière autonome dans la production fromagère. Que ce soit des petites productions au lait de chèvre, des productions au lait de vache ou au lait de brebis, il y a un peu de tout. Les producteurs belges vont naturellement copier, ou vont quand même prendre des recettes existantes en France, à l’étranger, en Italie, pour créer des nouveaux types de fromages, mais avec naturellement une base classique de production française.
On a des fromages à croûte lavée, des fromages à croûte fleurie, des petits chèvres. Ce sont souvent des bases existantes, mais sur des petites productions artisanales, c’est très important pour nous. Nous sommes un pays de la bière, il y a quand même beaucoup de fromages qui sont soit bien travaillés soit bien lavés à la bière.
En Belgique, on a également pas mal de fermes qui produisent des fromages de type Gouda, de manière artisanale, avec des croutages naturels, donc sans croûte en plastique ou en cire, et fermier ou au lait cru. On a de très bons producteurs de bleu, de fromage persillé et de chèvre aussi.
Quel rôle jouent les boutiques spécialisées et les marchés locaux dans la vente de fromages en Belgique ?
On va avoir une offre fromagère très large. On va souvent trouver plus de 150 à 170 références en boutique avec des fromages qui viennent de l’Europe entière. Alors, naturellement avec une base française, mais beaucoup de fromages italiens, belges, espagnols, anglais et hollandais. Il y a vraiment une gamme très large, parce que, du fait de nos localisations, les gens sont ouverts.
Quand on parle plus spécifiquement des fromages belges chez les crémiers fromagers, ils vont essayer de mettre en valeur les petites productions locales de leur région et d’être une vitrine pour les producteurs de leur région.
J’ai une boutique, nous y avons 190 références en permanence, et 20% est composé de fromages belges provenant de petits producteurs au lait cru.
Quelles sont les tendances actuelles en matière de consommation de fromage en Belgique ?
En Belgique, des soirées fromage et vin, des soirées fromage et bière entre amis, ça se fait vraiment beaucoup avec des plateaux garnis. C’est une tendance actuelle, mais je crois que c’est une tendance que l’on retrouve également en France. C’est l’essor ou l’envolée de la consommation des fromages de raclette. Je crois qu’en Belgique, nous étions des précurseurs.
On a des demandes de fromages à raclette jusqu’à la fin mars. En Belgique, nous avons une histoire riche de fromage coupé en tranches ; chez nous, les raclettes sont la plupart du temps vendues en petites tranches, pour mettre dans les petits poêlons, A côté des fromages natures, chaque crémier fromager a une offre très importante de fromage aromatisé. Il n’est pas curieux de trouver chez les crémiers fromagers en Belgique une offre de plus de 12 à 14 sortes de fromages raclettes, que ce soit les raclettes à l’ail des ours ou les raclettes au poivre. Mais j’ai déjà vu des offres de fromages à raclettes au Porto, aussi.
On voit également des crémiers fromagers qui vont lancer des bars à fromages, ou des boîtes de dégustation. C’est une autre forme de consommation, mais toujours dans le fromage et dans le partage.
Quels sont les critères d’évaluation utilisés dans le concours du premier fromager de Belgique ?
Le concours dure une journée et est composé de huit épreuves. C’est un concours agréé et officiel. Presque tous les gens qui veulent s’inscrire peuvent participer. Sinon nous n’aurions pas assez de candidats, je vais être honnête. Pourquoi ? Il faut arriver à motiver les gens et à leur expliquer ce que cela peut créer pour eux, pour leur commerce.
Dans ce concours, nous retrouvons l’épreuve de découpe par exemple, où on leur donne des grands blocs de fromage. Ils doivent découper des fromages selon nos demandes, par exemple des morceaux de 250 grammes, des morceaux de 800 grammes. Ce sont plusieurs épreuves où on va essayer de trouver leurs aptitudes à être un bon crémier fromager. Et puis on termine toujours par l’épreuve principale qui est l’œuvre. Ils doivent composer un plateau de fromages selon un thème imposé avec un nombre prédéfini de fromages. Un nombre de fromages AOP, un nombre prédéfini de fromages belges, et c’est à eux de mettre en valeur les fromages et leur savoir-faire en faisant des découpes spécifiques, en étant créatifs.
Parlez-nous de votre boutique, et des habitudes de vos clients en termes de consommation…
J’ai une clientèle française, belge et internationale. On défend énormément les fromages au lait cru. On a quasiment 85% de notre assortiment qui est composé de fromages au lait cru. Notre clientèle vient pour ces fromages-là qui sont issus de petits producteurs, avec un affinage spécifique. Nous avons 4 caves d’affinage, tous les fromages que nous vendons sont affinés chez nous, sur place, et donc plus si on parle de ma boutique, c’est ça la différence, et c’est pour ça que les gens viennent. Nous sommes un fournisseur important pour la restauration, que ce soit des bars à vins, mais aussi les restaurants étoilés avec des gammes très spécifiques. Cela nous permet d’avoir une surface commerciale avec la boutique, mais aussi des ateliers d’affinage à l’arrière et donc tout est fait ici, sur place.
Pour vous, quelle est l’importance du Salon du fromage et des produits laitiers ? En quoi est-il un lieu incontournable pour les professionnels du secteur ?
Le Salon du fromage est le salon référence pour le secteur des produits laitiers et de la filière fromagère plus particulièrement. C’est un moment de rencontres, l’occasion de revoir les différents acteurs du secteur. C’est aussi la possibilité de faire des découvertes et de voir quelles sont les nouveautés. C’est, enfin, le moment pour resserrer les liens avec nos collègues français et étranger.
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