François Robin mélange gin et fromages
Le gin peut s’avérer un alcool en parfaite harmonie avec les fromages selon François Robin, l’un des plus célèbres experts fromages de France, qui en fera la démonstration au Salon du Fromage et des Produits Laitiers.
D’où vient l’idée d’associer gin et fromages ?
Je travaillais dans une fromagerie la première année de ma carrière où le patron bossait autour du whisky et des fromages. Il utilisait notamment du spray pour poser son whisky sur son fromage afin qu’il n’y en ait pas trop. J’ai trouvé le geste élégant et j’ai voulu reprendre cette idée pour les différents concours que j’ai faits. Mais le whisky me semblait un peu trop marqué et pas toujours pertinent – c’est une évaluation très personnelle ! Par contre, lorsque je suis arrivé chez Fauchon, il y avait des gins sublimes et je me suis dit que cela pouvait marcher avec une croûte lavée par exemple. J’ai fait des essais.
Je ne pense pas être le premier à associer cet alcool avec le fromage, mais c’était il y a quinze ans et c’était quelque chose d’un peu surprenant. D’autant plus que l’on avait alors une mauvaise culture du gin en France. Ce n’était pas un alcool qu’on appréciait. Il n’y avait pas toutes les distilleries que l’on a aujourd’hui.
Vous souvenez-vous de cette première expérience ?
Ma première bouchée, c’était sur du Langres, accompagné d’une compotée de mirabelles et d’un spray de gin par-dessus. Je connaissais la séquence qu’elle allait générer en bouche. Le gin avait son côté très aromatique d’agrumes, sa fraîcheur et son mentholé. Puis venaient le sucré de la mirabelle et enfin, pour terminer, la saveur du Langres. J’ai trouvé que ça allait bien. J’ai gardé cette idée sur mes animations.
Quel est l’élément dans les arômes qui sublime le fromage et qui surprend le consommateur ?
Quelque part, boire du gin, c’est boire du parfum. C’est aussi infini qu’un parfum puisqu’on est sur un alcool blanc de céréales qu’on va infuser et aromatiser avec de la baie de genièvre et après avec ce que l’on veut. On a des alcools qui peuvent rappeler l’eau de Cologne ou le terreau, le sarrasin. Il y a pléthore de possibilités. Le gin est plus ouvert et intéressant que le rhum, le whisky ou la tequila.
Le gin, c’est très aromatique, c’est très explosif. C’est pour cela je trouve que cela fonctionne. Et en plus particulièrement sur des gens qui ne connaîssent pas bien le gin et qui se disent qu’il y a décidément quelque chose à faire. Si cet alcool a cet arôme explosif, il laisse cependant ensuite la place au fromage. Et ça, c’est important.
Quels sont les fromages particulièrement bien adaptés à cet alcool ?
Je trouve que toutes les croûtes lavées – j’ai cité le Langres mais je pourrais aussi rajouter l’Époisses – sont vraiment bien avec le gin. On peut aussi aller sur des fromages comme le Brillat-savarin, le Brie, les croûtes fleuries, les fleurs naturelles. On peut les travailler de manière différente, peut-être avec des gels. Je faisais par exemple un brie fourré aux pistaches, aux abricots et au gin dans du mascarpone. Ce sont les deux familles qui fonctionnent le mieux avec cet alcool. Mais je dois dire que j’ai une vraie affection pour le Langres.
Le gin rééquilibre-t-il les saveurs du fromage ? Ou est-il simplement complémentaire?
J’irai plutôt sur une complémentarité et aussi une surprise, une relecture du fromage. Sur un fromage que l’on connaît par cœur comme le Brie ou le Brillat-savarin, cela apporte quelque chose de nouveau, de surprenant, d’aromatique. Cela n’agit pas comme un sirop où le sucre va balancer une salinité forte d’un fromage. Le gin agit sur l’aromatique et la relecture. Je dirais qu’on peut presque être un peu perturbé par l’expérience !
François Robin participera à un atelier dégustation dans le cadre du Salon du Fromage et des Produits Laitiers (27-27 février 2024)